Réponse à la réponse de Matéos, pour alimenter le débat

1/ explications de texte : Je reprendrai la même structure dans ma réponse que celle que tu as pris puisqu'il s'agit d'un débat à partir de ton texte de base : ELECTIONS /: PROPOSITIONS POUR UN DEBAT EN DEMOCRATIE DIRECTE. Je précise de suite, que bien qu'utilisant souvent le ton du pamphlet parce qu'il fait réagir plus, à aucun moment je n'ai eu l'intention de porter contre toi des accusations personnelles et je te renouvelle mes remerciements, comme à tous ceux qui veulent bien débattre.

Concernant la chronologie des interventions, je te donne acte de tout ce que tu veux. Mais si tu n'as pas pu faire diffuser ton texte à l'intérieur du CAD, dont je suis toujours membre, tu pourras commencer à te demander pourquoi les textes d'Astrid, d'Anne, et le mien, n'ont jamais été diffusés. Ce qui fait (pour mon texte) que sur les 130 membres du CAD les 115 qui ne viennent pas au réunions, ne savent pas que je ne veux plus cautionner la gestion " père aubergiste " et " propriété privée " du CAD. Ni l'agressivité envers les opinions différentes. Ib ibidem pour les textes des autres.

Passons à l'essentiel : Comme beaucoup d'anarchistes tu as du mal à envisager en plus des trois positions que tu as vues, concernant le vote du deuxième tour, d'autres hypothèses dont : je m'abstiens parce que c'est ainsi et sinon tu es un social traître (position très répandue,) Je vote Chirac parce que c'est un moyen de combattre Le Pen (et non pas par peur). Ce n'est pas qu'un point de détail ( !), c'est un des points de fond de mes interventions qui est que les anarchistes, en plus d'ériger l'abstention en dogme (ce qui est en train de sauter) refuse de discuter du détournement de la finalité du processus électoral. Peux-t-on utiliser ou détourner le processus électoral sans aucunement penser à une représentation électorale, à une délégation etc.. en dehors des situationnistes et de la mouvance anti-autoritaire, cette partie du débat est occultée. Il fallait faire sauter la marmite et finir par faire en sorte que le débat s'impose tout seul. C'est ce qui est en train de se faire aujourd'hui et le principal des arguments de ma position est exposé dans le texte que j'ai publié il y a quelques jours " Une analyse libertaire du 1er tour des présidentielles " et que je t'invite à débattre.

Les notions " d'urgence absolue " et de " pire certain ou probable " dont tu parles pour motiver ta prise de position, sont relatives, en effet au jour d'aujourd'hui tu n'as pas encore un pistolet sur la tempe et même, tu ne serais pas encore mort. Je veux dire par-là, que ces notions sont facteurs d'évaluation émotionnelle personnelle. Ainsi un habitué des combats contre l'extrême droite sera moins impressionné qu'une personne qui découvre le fascisme pour la première fois, par exemple et encore ces exemples se discutent. Je préfère évaluer d'autres facteurs pour me décider :
-Le vote " détourné " et " utilitariste " une fois désacralisé n'est pas un acte extraordinairement fort en signification personnelle, tout comme une pétition.
-Il y a là un moyen d'affaiblir la lepénisation de la vie politique française qui est directement reliée au baromètre du score électoral frontiste.
-Il y a dans la campagne elle-même un fort potentiel anti-autoritaire, le moyen de rencontrer des tas de gens sensibilisés un peu, par nos idées et qui ne demandent qu'à en savoir plus. Personnes que tu ne verras nulle part ailleurs.
-l'adition des votes individuels, contrairement à ce que tu penses, à un effet arithmétique pour éliminer quelqu'un. Ainsi en 81 Mitterrand, a été élu parce que les électeurs ne voulaient plus de Giscard. On nous dit, oui mais Mitterrand est pareil à Giscard ! Certes, mais à ce moment là, précis, les gens qui souffraient depuis 20 ans du gaullisme voulaient se débarrasser de Giscard. Et il n'appartient ni à toi, ni à moi, ni à Dieu, ni à Bakounine, de penser à leur place. Et par contre Lénine conseillait de se placer en avant, mine de rien et de prendre des décisions pour leur bien.
-Enfin si tu relis tes textes, mais surtout ceux de ceux qui prônent la continuation du dogme abstentionniste pour ce dimanche (je te concède volontiers et je t'en remercie encore qu'au moins ta démarche mène à un débat) on a tout à fait l'impression que vous avez peur de vous moucher pour ne pas salir votre mouchoir.

Les vraies questions que tu te poses (réponses) :
1/Un insuccès électoral de l'extrême droite sera un coup de frein à la lepénisation du discours des hommes politiques, tel Frêche par exemple. Quant à l'unité locale des libertaires, qu'elle utopie ! Les libertaires " déclarés " montpelliérains représentent, malgré leur petit nombre, un vaste éventail à la Prévert, depuis des chercheurs, théoriciens, jusqu'aux Pol-Pot en puissance, en passant par des alcooliques notoires, des militants sincères, des associatifs débordés, des paumés affectifs, des généreux, des marxistes, des qui n'ont entendu Bakounine que dans les chansons de Ferré…. Et en dehors de cela dix fois plus de monde avec leur spontanéité, leur naïveté parfois, leur générosité souvent, font avancer les idées anti-autoritaires au quotidien, dans la " vraie vie " comme il est tendance de dire chez les bobos.

2/ Ne pas confondre terrain social et terrain des organisations politiques, syndicales et des associations de récupération. Je suis d'accord avec toi que c'est sur le terrain social que la partie peut se gagner, mais à condition de ne pas en avoir une vision de type " marxiste ". Dans le social il y a aussi le sociétal (la culture, les rapports humains…)

3/ …

4/J'ai effectivement signé l'appel à la refondation du mouvement libertaire, et je suis prêt à en signer d'autres. Pour moi il s'agissait d'une démarche apartidaire qui devait être ouverte sur les non-encartés et ouverte sur l'extérieur : la mouvance. Il s'est avéré que cet appel n'a pas marché, à mon sens, entre autres, parce que les organisations libertaires après avoir fait la fine bouche s'y sont engouffrés pour ne pas louper le train tout en le faisant dérailler. Je ne voie une telle démarche, qu'en dehors de toute organisation libertaire existante(un peu le principe de base du CAD), même si la double appartenance peut-être possible. L'échec de cette démarche m'a conforté dans mon analyse. Je suis donc prêt à participer à la création d'une organisation fédérative d'individus, créée en dehors des organisations libertaires classiques, mais acceptant leurs membres à titre individuels. Et je pense que certaines modalités de base doivent être proposées dés le départ, pour éviter l'entrisme. Mais c'est là un autre débat. Qu'il faut avoir.

5/Je n'avais guère envie de répondre à ce point, et je me demande encore ce que ma vie vient faire dans les arguments qui ont pu te décider à prendre telle ou telle décision. De ton texte, il semble que je sois un refoulé, complexé par une exclusion de la FA en (Mai ?) 68 (j'avais 14 ans), et ayant rejoint Mitterrand en 81 en même temps que je devenais patron. La dernière fois que j'ai entendu parler de ce texte c'était par la FA de Montpellier, qui voulait inciter la FA nationale à ne pas rejoindre la lutte que VAP menait contre le centres de rétention d'Aniane. Et la dernière fois que dans le milieu circulaient des infos sur ma vie professionnelle, c'était un flic de R.G. qui au squat de la Maison Bleue glissait en douce " ne suivez pas VAP, J G travaille dans le minitel rose " Petites rectifications : a/ j'ai été viré de la F.A. en 72-73 pour " vol de timbres ". je représentai le seul groupe de jeunes (lycéen) de la FA. C'était aussi le plus nombreux avec le groupe Louise Michel, tu comprends ce que compte tenu des statuts de la FA cela voulait dire à un congrès. D'autant que nous avions adhéré grâce à l'action de Maurice Laisant, ennemi intime de Joyeux, et cerise sur le gâteau, que nous étions responsables des affrontements un 1er Mai avec le SO de la CGT qui fit une bonne soixantaine de blessés (dans les rangs de la CGT) et quelques horions sur les vieux de la FA.
b/ je n'ai pas écrit ce texte en 81, mais en 83 (municipales) ou je dis en fait : " entre voter Delmas et voter Frêche, il faut voter Frêche parce que c'est le plus con des deux " Ma position sur les élections est d'ailleurs fort ancienne : en 77 je soutenais Serge Livrozet qui se présentait à Paris au nom du Comité d'Action des Prisonniers pour faire parler des luttes dans les prisons. En 81 VAP dont je faisais partie, soutenait Coluche. Entre les deux tours de 81, VAP appelait à battre la droite par une affiche que tu peux trouver sur ce site intitulé 1958-1981 ça suffit " et représentant le ministre de l'intérieur de l'époque enculant la statue de la justice. En 83 VAP envisageait de se présenter aux municipales, avec des écolos et des associations de quartier, pour promouvoir la vie associative. En 94 enfin Vap débattait de la possibilité de se présenter aux municipales sur le programme que tu trouveras sur ce site dans un texte intitulé " 50 propositions pour Montpellier en 95 ". Il fut décidé de faire la pré-campagne et de ne pas se présenter réellement.
c/ enfin et bien que cela ai peu d'intérêt, je n'ai pas arrêté le militantisme en 81 mais en 98 ou après 30 ans de luttes dans la mouvance libertaire, j'ai pris ma " retraite ". C'est à dire que je me suis mis un peu de coté de l'action tout en ne reniant rien du passé. Quant à mes affaires, n'ayant jamais voulu travailler pour un patron, j'ai toujours travaillé pour moi bien avant et bien après 81, j'ai été entre autre journaliste indépendant, restaurateur, sérigraphe, trafiquant, afficheur, installateur d'échafaudages, propriétaire de services télématiques, réparateurs d'ordinateurs et bien d'autres choses encore.

Que le débat continue (de façon moins personnelle si possible). Nous ne perdrons rien, et l'anarchisme non plus, à penser.

Jean Gilbert 3 Mai 2002